Le Conseil d’État confirme que l’agent public placé en congé de maladie peut être exclu temporairement de ses fonctions
Pour rappel, le placement en congé de maladie d’un agent public ne fait pas obstacle à l’engagement ou à la poursuite d’une procédure disciplinaire à son encontre.
Cependant, la jurisprudence administrative a longtemps considéré que la sanction disciplinaire de 3ème groupe d’exclusion temporaire de fonctions (de 15 jours à 2 ans) ne pouvait pas se conjuguer avec le placement en congé de maladie d’un agent public (à titre d’exemple : CAA Nantes, 17 février 2015, n° 13NT02861).
En effet, l’agent public ne pouvait alors pas être exclu tant que la condition d’inaptitude physique était remplie.
La collectivité devait donc attendre la fin du congé de maladie de l’agent public ou diligenter une contre-visite médicale permettant de déterminer si l’arrêt de travail était justifié.
Si l’arrêt de travail se révélait être justifié, l’administration était alors contrainte d’attendre la fin de l’arrêt de maladie pour exclure temporairement de ses fonctions l’agent sanctionné.
Il y a quelques années, le Juge administratif faisait évoluer sa position concernant l’application de la sanction disciplinaire de révocation infligée à un agent public placé en congé de maladie.
En effet, par une décision du 6 juillet 2016, le Conseil d’Etat avait précisé que « la circonstance qu’un agent soit placé en congé de maladie ne fait pas obstacle à l’exercice de l’action disciplinaire à son égard, ni le cas échéant, à l’entrée en vigueur d’une décision de révocation. » (Conseil d’Etat, 6 juillet 2016, n° 392728)
De ce fait, un agent public pouvait alors être révoqué pendant son congé de maladie.
Concernant l’exclusion temporaire de fonctions, le Conseil d’Etat avait uniquement précisé que les indemnités versées aux fonctionnaires durant la durée du congé de maladie avaient pour seul objet de compenser la perte de rémunération due à la maladie par dérogation au principe du traitement après service fait.
Ainsi, ces indemnités versées ne pouvaient pas avoir pour effet d’accorder à l’agent placé en congé maladie, des droits à rémunération supérieurs à ceux auxquelles il aurait prétendu s’il n’en avait pas bénéficié (Conseil d’Etat, 8 octobre 2012, n° 346979).
Néanmoins, la Haute Juridiction administrative n’avait pas revu sa jurisprudence sur le cas d’un agent placé en congé de maladie et dont une sanction d’exclusion temporaire de fonctions devait lui être infligée.
Or, la Cour administrative d’appel de DOUAI, dans son arrêt n°20DA01958 du 25 novembre 2021, si elle rappelait la position du Conseil d’Etat précédemment développé, ajoutait que le fait qu’un agent soit placé en congé de maladie ne faisait pas obstacle à l’exercice d’une procédure disciplinaire ni même à l’entrée en vigueur d’une sanction disciplinaire notamment celle d’exclusion temporaire de fonctions.
Plusieurs Juges du fond ont alors suivi la ligne de conduite de la Cour administrative d’appel de Douai.
Ce n’est que très récemment, que le Conseil d’Etat a estimé que « la procédure disciplinaire et la procédure de mise en congé de maladie sont des procédures distinctes et indépendantes, et la circonstance qu'un agent soit placé en congé de maladie ne fait pas obstacle à l'exercice de l'action disciplinaire à son égard ni, le cas échéant, à l'entrée en vigueur d'une décision de sanction [en l’espèce notamment une exclusion temporaire de fonctions de deux ans]. » (CE, 3 juillet 2023, n° 459472)
Dès lors, par cette décision la Haute Juridiction administrative entérine la position des Juges du fond et le fait que la sanction d’exclusion temporaire de fonctions peut être exécutée pendant le congé de maladie de l’agent intéressé.
Si les collectivités territoriales n’ont pas attendu la confirmation par le Conseil d’Etat de la possibilité d’exécuter a sanction disciplinaire d’exclusion temporaire de fonctions pendant le congé de maladie de l’agent intéressé, cette jurisprudence permet de sécuriser et de légitimer cette manière de procéder.